Edito: Infantilisation rime avec manque d'adhésion

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Au moment des fêtes de fin d'année, l'ineffable Yves Van Laethem nous avait prodigué ses merveilleux conseils issus du nouveau manuel du savoir vivre en mode Covid.

Sans rire, Tonton Yves nous expliquait comment laisser ses masques à l'entrée de vos hôtes dans un sac en plastique, que ne plus se lever pour aider à débarrasser était désormais une marque de respect, qu'il était conseillé de ne pas raconter des blagues trop rigolotes pour ne pas éclater de rire, qu'il ne fallait pas chipoter à la collec de CD. Pour peu, il nous aurait expliqué comment remplacer l'armagnac de fin de repas par un bon petit shot de gel hydroalcoolique. 

Aujourd'hui que nous entamons notre (très) lent chemin vers le déconfinement, Tonton Yves remet le couvert en nous prodiguant, par interview interposée, ses 10 bons conseils pour des activités externes en toute sécurité sanitaire. Par exemple, sur la plage, vous pouvez jouer à la pétanque. Mais en gardant vos boules (sic). Et puis vous pouvez jouer au frisbee. C'est sympa le frisbee. Et puis ça permet de garder ses distances. Comme le kayak in illo tempore...

Tonton Yves nous enseigne aussi, plussoyé par le ministre de la Santé, qu'on peut désormais aussi traverser la maison de son hôte pour aller au jardin. Et même accéder aux toilettes...

Des recommandations d'ailleurs gravées dans le marbre du dernier arrêté royal détaillant les nouvelles mesures décidées par le Codeco (comité de concertation).

Et là, comme dirait Paul Magnette, les  bras nous en tombent. Jusqu'où ira-t-on dans l'infantilisation? Sous couvert de pédagogie et de communication, les responsables politiques s'immiscent désormais au plus profond de la vie privée et de l'intimité de la population, allant jusqu'à nous éclairer sur ce que nous pouvons faire au sein même de notre foyer.

A un moment où l'adhésion de la population aux mesures anti-covid n'a jamais été aussi aléatoire, eu égard à l'épuisement généralisé, les décideurs ne s'y prendraient pas autrement s'ils voulaient définitivement éloigner le citoyen du respect des règles.

Ce dont nous avons besoin, ce ne sont pas des politiques ou des experts qui nous donnent jour après jour des leçons de morale comme si nous étions des gamins de 8 ans. Ce dont nous avons besoin, c'est de confiance, du sens de la responsabilité et de la responsabilisation.

On le répète depuis le début :

Oui les excès et les dérapages existent.

Non, la majorité de la population ne fait pas n'importe quoi et contribue courageusement, jour après jour à l'effort collectif dans la lutte contre la pandémie en respectant largement des mesures pourtant liberticides pour certaines.

La preuve : après un an, malgré les multiples fiascos dans la gestion de cette crise, malgré le manque d'empathie récurrent de la classe dirigeante, malgré une communication catastrophique, malgré le sentiment que certains au Codeco ne touchent plus terre depuis longtemps, oui, malgré tout cela, le peuple belge continue à suivre tout ce qu'on lui dit dans le calme et l'ordre, en dépit de certains grommellements sectoriels. 

Encore quelques semaines à tenir. Et nous le ferons. Mais sans qu'on nous prenne pour des enfants. Parce que ce serait là le pire des mépris pour des millions de gens dont la résilience est inversement proportionnelle à la compréhension dont font preuve certains dirigeants à leur égard.


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