Charleroi fait partie des dix villes en Belgique où l’Espace P accompagne les travailleuses et travailleurs du sexe. Avec Entre 2 Wallonie, ils constatent une prostitution de plus en plus précaire.
À Charleroi, à proximité des rues moins fréquentées, la prostitution reste une réalité souvent ignorée.
Depuis plus de trente ans, l’Espace P tend la main aux travailleuses et travailleurs du sexe. La structure, anonyme et gratuite, offre un lieu où se poser, parler et surtout être écouté. « C’est un espace où on peut se reposer, discuter, respirer et prendre les infos nécessaires », explique Cécile Cheront, coordinatrice générale d’Espace P Charleroi. « On est aussi et surtout là en cas de besoin particulier : outils de dépistage, contraception, accompagnement social… »
Pour Virginie, prostituée depuis plus de 25 ans, la situation est devenue plus difficile.« On craint l’insécurité. Avant, dans le quartier du Triangle, on était toutes ensemble, on se veillait. Aujourd’hui, on est éparpillées parce qu’on est chassées », confie-t-elle.
Parmi les autres associations qui œuvrent sur le terrain, il y a l'ASBL Entre 2 Wallonie. Elle accompagne les personnes prostituées sur différents volets : psychosocial, médical et juridique. La peur, la précarité et parfois la dépendance rythment le quotidien de ces femmes. Beaucoup cumulent les difficultés : sans papiers, toxicomanie, problèmes de santé mentale ou absence de logement. « C’est souvent la double peine », déplore Laetitia Collet, assistante sociale chez Entre2Wallonie. « Elles ne peuvent pas aller à l’hôpital si elles sont sans papiers, ni dans certains centres si elles consomment. Elles ne sont acceptées nulle part, si ce n’est en rue. »
Les soins médicaux deviennent une porte d’entrée. Un prétexte pour recréer du lien, pour réhumaniser un quotidien abîmé. « Là, on est écoutées, respectées. On se sent humaines », souffle Virginie.
Contrairement à d’autres villes, la prostitution reste partiellement visible à Charleroi. La création d’un quartier rouge, sur le modèle anversois, a bien été évoquée, mais l’échevine de l’Égalité des chances s’y oppose, préférant un travail de fond avec les associations locales et le ministre compétent, Yves Coppieters. Les discussions devraient s’ouvrir dans les prochaines semaines, mais les moyens manquent.
Dans un contexte de coupes budgétaires dans le secteur associatif, ces initiatives reposent souvent sur la bonne volonté des équipes de terrain.
À Charleroi, la prostitution reste avant tout une question humaine — faite de solitude, de courage et de solidarité discrète. Une réalité qui ne veut pas être oubliée.
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