À l’heure où l’extrême droite inquiète partout en Europe, la Wallonie continue de résister. Mais dans la région de Charleroi, les dynamiques sont plus complexes.
Charleroi a déjà connu, dans son histoire, des mouvements fascistes. Les spécialistes rappellent que la région n’est pas étrangère à ces idéologies, même si elles n’ont jamais pris l’ampleur observée en Flandre. Jean Faniel, directeur général du CRISP, note que certaines grandes villes présentent davantage de foyers militants : « On a des foyers plus importants en termes d’organisations d’extrême droite, avec des militants et des dirigeants qui reviennent régulièrement, à Charleroi comme dans la région de Fleurus. » Selon lui, le contexte socio-économique joue un rôle clé : « Ce que l’on vit soi-même, ce que l’on constate autour de soi, peut alimenter la déception politique et la volonté d’aller chercher autre chose que les offres jugées trop traditionnelles. »
Récemment, un parti baptisé TRUMP, héritier du Front national, avait même prévu son inauguration à Charleroi. Pour Manuel Abramowicz, journaliste spécialisée sur l'extrême droite, il ne faut toutefois pas exagérer leur poids : « Ça reste un groupuscule. » Dans le sud du pays, ces formations demeurent marginales, en partie grâce au cordon sanitaire politique et médiatique. Mais Jean Faniel souligne un autre élément déterminant : « La société civile, le monde associatif et syndical jouent un vrai rôle en démontant les idées d’extrême droite et en montrant ce qu’il y a derrière ces programmes. »
Charleroi, Ville antifasciste : une mobilisation active
Sur le terrain, la vigilance est en effet réelle. Deux ans après une manifestation antifasciste qui avait dégénéré, Charleroi a officiellement adopté, en 2023, une motion déclarant la ville “antifasciste”. Cette décision fait suite à une mobilisation large du monde syndical et associatif.
Vincent Pesitaux, cofondateur du collectif antifasciste carolo, en explique l’origine : « Le front commun syndical a invité tout le monde associatif à se réunir pour interpeller les responsables politiques et obtenir une motion antifasciste. Depuis 2023, à chaque fondation d’un parti fasciste, nous empêcheons qu’il prenne place sur le territoire carolo. »
Pour ces militants, la menace ne se limite pas aux scores électoraux. Elle se niche aussi dans le discours du quotidien. Manuel Abramowicz met en garde : « Lorsqu’on entend des blagues racistes ou stigmatisantes, il faut répondre systématiquement. » Un combat qui, pour Vincent Pesitaux, passe avant tout par la mobilisation et l’éducation : « Il faut rester sur le terrain, mais aussi se mobiliser socialement. Il faut que dans l’enseignement, on parle du racisme et du fascisme. »
Comprendre le passé pour protéger l’avenir
Si l’extrême droite reste faible dans les urnes en Wallonie, ses idées peuvent progresser sans parti structuré. Pour les experts comme pour les militants, la meilleure protection reste une démocratie vivante, une mémoire active et un travail constant de prévention.
Charleroi, forte d’un passé parfois méconnu et d’une mobilisation actuelle, continue donc de jouer un rôle important dans la lutte contre les dérives extrémistes. Une vigilance indispensable pour préserver l’avenir démocratique de la région.
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