Lors du conseil communal de Charleroi ce lundi, la modification budgétaire était au centre des débats. La Ville, confrontée à une pression financière croissante, a annoncé plusieurs mesures visant à ajuster son budget.
En fin d’article, à lire aussi - Autres points abordés lors du conseil :
- Prises de paroles des syndicats
- Le stationnement : un mal pour un bien ?
- Reconversion du site de l'ancien Makro
- Fin de la prime anti-cambriolage
Objectif financier : augmenter les recettes fiscales
Charleroi est sous pression financière, et devait prendre de nouvelles décisions. Pour rappel, une modification budgétaire, c’est un ajustement du budget voté précédemment. Ici, l’objectif affiché est d'augmenter les recettes fiscales de l'ordre de 10 à 15 millions d'euros. Pour ce faire, plusieurs mesures ont été votées :
- Hausse du précompte immobilier : augmentation de 61 € pour les précomptes les plus élevés et de 20 € à partir de 602 € de précompte.
- Taxe sur les sites d’activité économique désaffectés, les centres commerciaux et les piscines privées.
- Indexation de la taxe sur la force motrice, ainsi que des établissements bancaires et des cinémas
- Fin de la mise à disposition gratuite de salles ou de matériel communal.
- Augmentation du prix des documents administratifs et de la taxe sur les déchets.
Ces ajustements visent à répondre aux obligations imposées par le Plan Oxygène, un accord entre la Région wallonne et les communes pour soutenir les finances locales.
Réactions
Avant d’entrer dans le vif du sujet, mesure par mesure, chaque groupe a donné son avis général sur ces modifications.
Jean-Noël Gillard (MR-IC) : « La dette, c’est 240 000 € par jour. Mais on continue. On fait de nouveaux emprunts pour des mises en conformité d’incendie, dans les écoles… », déplorant un manque d'investissement préventif.
Germain Mugemangango (PTB) : « Ce n’est pas une modification budgétaire technique, c’est politique. On voit ici que vous suivez ce que le CRAC et son plan Oxygène vous imposent. » Il craint des pertes d'emplois et des difficultés pour le CPAS. « Si on veut être honnête vis à vis des citoyens, on doit résister! Et pas juste constater que les mesures des autres niveaux de pouvoirs impactent la vie des Carolos. »
Isabelle Greco (PS) : « Les grands offusqués sont de sortie. Rappelons quand même que les obligations régionales expliquent les mesures prises aujourd’hui. On a quand même essayer de préserver les Carolos malgré les frais de transfert et ce fameux plan oxygène. »
Steve Elias (Les Engagés) : « Il vaut mieux un budget sincère que des mesures illusoires. Nous avons allégé là où c’était possible et maintenu ce qui est essentiel. Nous avons choisi le voie de l’équilibre, pas cette de la facilité. »
Le bourgmestre répond, la présidente cadre
Le bourgmestre Thomas Dermine (PS) a souligné : « Nous ne pourrons jamais nous délester de nos responsabilités, contrairement aux autres niveaux de pouvoir. Car nous sommes au plus proche de nos citoyens. Il y a un problème structurel des grandes villes, et même en faisant tout parfaitement, on serait en déficit. C’est comme ça. Alors ici, on a pris des mesures pour que le gouvernement fasse le nécessaire pour garantir la stabilité de nos institutions. Ce n’est pas fait de gaieté de cœur, mais on a dû prendre des mesures. Notre stratégie est de faire notre part du travail, puisque la Région s’est engagée à faire la sienne.»
Le conseil communal s’étant prolongé tard dans la nuit (il était déjà plus de 23 h), les chefs de groupe se sont réunis sous l'impulsion de la présidente pour organiser le reste du déroulement. Cette mini réunion avait pour objectif de réduire les prises de parole, afin de permettre au conseil d’avancer. Malgré cet accord, le groupe MR‑IC a tenu à intervenir sur plusieurs points, exprimant son désaccord et dénonçant la hausse des taxes. À chaque critique, le collège communal a répondu que ces mesures étaient imposées par la circulaire budgétaire et les obligations liées au plan Oxygène, illustrant les tensions entre majorité et opposition.
Détails des nouvelles taxes et redevances
Plusieurs nouvelles taxes et redevances ont été introduites ou augmentées :
- Redevance sur l'occupation du domaine public communal lors des activités foraines et gastronomiques.
- Redevance sur l'occupation d'emplacements dans le cadre d'activités ambulantes sur les marchés publics.
- Redevance pour la constitution de dossiers administratifs relatifs à l’état des débits fixes de boissons et des établissements de restauration.
- Redevance pour la délivrance de copies de documents administratifs.
- Redevance sur l’occupation privative temporaire de la voie publique.
- Redevance pour les prestations liées aux funérailles et sépultures, avec un renouvellement du règlement fixant ce tarif qui vient à expiration le 31 décembre 2025
Une indexation automatique de 23,43 % est prévue pour plusieurs redevances, avec une indexation annuelle à venir.
Modifications spécifiques :
- Taxe communale de collecte et de traitement des déchets ménagers : augmentation prévue, avec des réductions de 50 % pour les isolés et de 25 % pour les familles monoparentales. Chaque famille recevra également 10 sacs gratuits en moins.
- Taxe sur les piscines privées : mise en place d'une nouvelle taxe pour les piscines privées.
- Taxe sur les commerces de petite restauration et sur l’ouverture des night-shops.
Le PTB et le MR-IC ont exprimé leurs inquiétudes concernant ces mesures, notamment le risque d'augmentation des dépôts clandestins de déchets.
Autres points abordés lors du conseil
Prise de parole des syndicats
Avant le début de la séance, Philippe Barbion, secrétaire régional de la CGSP Admi de Charleroi, a tenu à prendre la parole à l’aube de la grande manifestation en front commun.
« Nous sommes ici pour réveiller les consciences. » Un réveil à la main, symboliquement, Philippe Barbion a rappelé que de nombreux secteurs sont en difficulté ou vont le devenir. « Tous les malades ne sont pas de faux malades, tous les chômeurs ne sont pas des profiteurs… Enseignement, soins de santé, police, pompiers, enseignement, les communes… Tous les métiers sont touchés. On doit freiner ce gouvernement. Je vous invite à vous rendre à Bruxelles avec nous demain. »
Les réactions :
- MR-IC (Jean-Noël Gillard) : « Je suis étonné par la manière dont les syndicats viennent perturber les travaux de démocratie locale. En plus, vous êtes dans la caricature des méchants libéraux. Quand on voit la situation à Charleroi (1 personne sur 2 ne travaille) pas, la réforme ne va pas faire mal, elle est nécessaire si on veut venir en aide aux personnes qui en ont vraiment besoin. »
- PTB (Thomas Lemaire) : « Je partage vos inquiétudes notamment concernant les pensions. »
- PS : « Le réveil est mis chez les socialistes. On sera à 7 h à la gare. »
Le stationnement : un mal pour un bien ?
Jean-Noël Gillard, chef de groupe MR-IC, a interpellé le collège au sujet des nouvelles mesures de stationnement. Il pointe du doigt l’extension de la gratuité de stationnement de 30 min à 1 h, « alors que c’était déjà le cas puisque les usagers bénéficiaient déjà de 2 fois 30 minutes de gratuité par demi-jour. Tromperie ? », indique le conseiller.
Mathieu Marchal, conseiller PTB, a lui applaudi l’extension de la gratuité à 1 h : « Pratique 30 min par demi-journée, mais je me vois mal aller au matin chez le coiffeur et après-midi terminer la coupe, mais bon » (en référence à la « tromperie » soulevée par M. Gillard). Le conseiller PTB a par contre regretté l’apparition d’horodateurs à Marcinelle et Mont-sur-Marchienne.
Réponse du collège
« La mobilité, ce n’est pas une science exacte. On ne peut pas faire du sur-mesure pour chaque réalité », indique Alicia Monard (PS), échevine de la Mobilité. « 2×30 = 60, bien vu ! Mais les calculs ne sont pas bons, Kevin. Autant les 2 fois 30 min n’étaient pas utilisées, autant ici l’heure est bien utilisée. Ces 2 fois 30 min sont basées sur un ancien règlement. »
Concernant les nouvelles zones, l’échevine indique que par endroit, il s’agit de la régularisation de décisions prises sous les dernières législatures. « Mais pour rappel, la zone blanche est là pour protéger les riverains des effets négatifs du stationnement excessif et assurer une meilleure rotation. »
Une phase de tolérance est mise en place, les citoyens auront le temps de s’adapter aux nouveautés.
Des militaires en rue : quoi, quand, comment ?
Lors du dernier conseil communal, dédié à la sécurité, la question de la présence de militaires en rue a suscité pas mal de discussions. Aujourd’hui, Thomas Dermine affirme que les choses avancent, que plusieurs travaux ont été entrepris et que le ministre Quintin a rencontré les bourgmestres des grandes villes pour affiner le plan « grande ville ».
« Les militaires ne remplaceront pas les policiers. Il ne faut pas masquer les vrais enjeux : renforcement de la police fédérale, refinancement de la zone de police… Mais nous ne savons pas encore comment ça se déroulera. On ne sait pas ce que le gouvernement fédéral veut exactement. Un ministre parle de soutien aux policiers, un autre veut modifier certaines missions des militaires pour un déploiement d’ici avril 2026. Nous attendons de savoir quelle est l’approche qui sera retenue. »
C’est pas moi, c’est lui
Denis Ducarme, conseiller MR-IC et député fédéral, a tenu à prendre la parole : « Pas d’inquiétudes, les deux ministres vont se mettre d’accord pour qu’on ait davantage de moyens pour réparer les problèmes de sécurité de Charleroi, que l’on doit au Parti socialiste. »
Isabella Greco, conseillère PS, a rappelé qu’à Charleroi, la police fédérale est amputée de 40 personnes. « Et on en prend encore 7 pour les envoyer à Bruxelles et Anvers. Nous, Carolos, sommes les oubliés du gouvernement. Charleroi fait du mieux qu’elle peut avec ce qu’elle a. »
Thomas Dermine a appelé à la nuance, rappelant que la sécurité est l’affaire de toutes et tous. « Pour rappel, ça fait 25 ans que les ministères de l’Intérieur et de la Justice sont libéraux. Mais bref, ce qu’on veut, c’est un peu de responsabilité, on s’en fout si c’est la faute du local ou du fédéral ! »
Fin de la prime anti-cambriolage
Jean-Noël Gillard, chef de groupe MR-IC, a questionné le collège sur la suppression de la prime communale de sécurisation des habitations. En place depuis 1993, elle permettait jusqu’à 400 € par logement.
« Le nombre de cambriolages a-t-il chuté drastiquement à Charleroi ? Le besoin en prévention a-t-il diminué ? Cette prime n’était-elle pas efficace ? La décision de la supprimer intégralement sans proposer de transition ou de solutions de remplacement est un signal négatif envoyé aux Carolos qui souhaitent investir dans leur sécurité », questionne le conseiller MR-IC.
Réponse du collège
Thomas Dermine a répondu qu’il était toujours étonné de ce genre de question, puisque ce genre de mesure fait suite à la convention Oxygène qui demande de mettre fin aux primes.
« Nous avons dû compenser la perte du chèque sport, ici on n’a rien pu faire. Pourquoi ? La prime n’était pas un incitant. La prime était obsolète puisqu’elle ne couvrait pas les caméras et autres technologies. Et oui, les cambriolages sont en baisse : moins 50 % depuis 2018. »
Jean-Noël Gillard a conclu : « Investir dans la sécurité des Carolos ne semble donc pas être votre priorité. La convention Oxygène n’est qu’un alibi puisqu’elle vous donne des marges de manœuvre. Assumez vos choix. » Thomas Dermine a exprimé son ras-le-bol, rappelant qu’il était complètement engagé pour la sécurité des citoyens.
Reconversion du site de l'ancien Makro de Lodelinsart
Thomas Dermine a fait le point sur l’avenir de l’ancien site du Makro. Un nouveau propriétaire des 7 sites Makro en Belgique veut les redévelopper à travers une stratégie en deux temps :
- Installer des enseignes dans les infrastructures existantes de Makro à court terme, d’ici 2026
- Introduire une nouvelle demande de permis pour reconfigurer le site
L’objectif est d’en refaire un site commercial.
« Quant à Fedasil, un recours face au permis du fédéral est en attente. Mais l’accord avec Fedasil expire en janvier 2026. Le projet commercial a le plus de sens vu les antécédents de cette zone à vocation économique. »
Lire aussi : Report de la motion de soutien à Télésambre : « Battons-nous pour notre bassin de vie »
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